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La cession de parts de société agricole

La cession de parts de société agricole

Vous envisagez de transmettre, vendre, donner, des parts d’une société agricole ? Depuis 2023, la cession de parts sociales de société agricole est encadrée par des règles strictes. Voici ce qu’il faut savoir pour éviter les erreurs et respecter la procédure.

TRANSMETTRE UNE SOCIÉTÉ AGRICOLE

Dans une société agricole, chaque associé détient des parts sociales. Ces parts sont attribuées en fonction de ce que chacun a apporté à la société : argent, matériel, terres, etc. Avoir des parts sociales donne plusieurs droits : une part des bénéfices, un droit de vote dans les décisions qui concernent la société et parfois un rôle dans la gestion.

Ces parts donnent un droit sur une partie de la société, mais pas directement sur un bien précis (comme un champ ou un bâtiment).

Céder ses parts, c’est transmettre sa place dans la société à une autre personne. Cela peut se faire :

  • à titre onéreux, par exemple par une vente ou un échange,

  • à titre gratuit, notamment dans le cadre d’une donation ou d’une succession.

Céder ses parts, c’est transmettre une partie ou la totalité de sa place dans la société à une autre personne. Si toutes les parts sont transmises, le vendeur ou le donateur quitte la société et le nouvel associé le remplace. En cas de cession partielle, il reste associé aux côtés du nouvel entrant. 

CE QU’IL FAUT VÉRIFIER AVANT DE TRANSMETTRE SES PARTS SOCIALES 

Pour transmettre ses parts, plusieurs vérifications et démarches sont indispensables.

Vérifier le contenu des statuts de la société

Chaque société a des règles internes fixées dans ses statuts. Avant toute cession, il est essentiel de les consulter.

Les statuts peuvent par exemple :

  • imposer l’accord des autres associés pour la cession des parts ou le choix du nouvel associé entrant (ce qu’on appelle une clause d’agrément),

  • autoriser plus facilement les transmissions dans le cercle familial,

  • ou encore interdire les cessions pendant les premières années de détention des parts sociales.

Bon à savoir : Ces règles s’appliquent même entre proches, il est donc primordial de les vérifier et de les respecter.

Rédiger un acte écrit et l’enregistrer

La cession de parts sociales doit être formalisée par écrit. Cela peut se faire :

  • soit par acte notarié (rédigé par un notaire), obligatoire pour les cessions à titre gratuit comme une donation ou une succession,

  • soit par acte sous seing privé (signé par le cédant et l’acquéreur des parts), souvent suffisant pour une cession à titre onéreux comme une vente.

Même si l’acte de cession est valable dès sa signature, il doit être enregistré auprès des services des impôts des entreprises (SIE) pour être opposable aux tiers. Cet enregistrement sert à officialiser la cession et à donner une date reconnue à l’acte. L’administration joue ici un rôle de témoin : elle atteste que la vente a bien eu lieu et permet de rendre le changement d’associé opposable aux tiers (comme les autres associés, la SAFER ou les créanciers).

Prendre en compte la situation du conjoint

Si les parts appartiennent à un couple marié sous le régime de la communauté, le conjoint du cédant (du donateur ou vendeur des parts) devra donner son accord pour la donation, la transmission ou la vente, même s’il n’est pas lui-même associé.

Si la personne qui reçoit ou achète les parts est mariée sous le régime de la communauté, son conjoint peut demander à devenir lui aussi associé. En effet, dans ce régime, les biens achetés ou reçus pendant le mariage sont partagés entre les deux époux. Même si les parts sont au nom d’un seul, l’autre peut faire valoir qu’il en détient la moitié, et demander à entrer dans la société.

Dans ce type de situation, il est vivement conseillé de se faire accompagner par un notaire ou un avocat spécialisé en droit de la famille, droit civil ou gestion de patrimoine, afin de clarifier les droits de chacun et d’éviter toute mauvaise surprise. 

Faire attention à l’indivision

Lorsque plusieurs personnes détiennent des parts ensemble en indivision, par exemple après une succession, elles doivent toutes être d’accord pour les céder.

Sans cet accord, aucune cession n’est possible, sauf décision du juge.

 

DÉCLARATION, AUTORISATION : LES RÈGLES À RESPECTER 

Depuis 2023, la cession de parts sociales de société agricole est soumise à un encadrement légal strict, destiné à éviter l’accaparement des terres agricoles et à favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs.

La loi Sempastous

La SAFER contrôle déjà les ventes directes de foncier agricole, notamment grâce à son droit de préemption. Mais pendant longtemps, certains ont contourné ce contrôle en ne vendant pas directement les terres… mais en transmettant les parts de la société qui les détient. Résultat : les terres changeaient de main sans que la SAFER ou l’État n’aient leur mot à dire.

La loi Sempastous, entrée en vigueur en 2023, a été créée pour fermer cette brèche. Elle impose un contrôle préalable sur les cessions de parts sociales dès lors qu’une société détient ou exploite du foncier agricole. 

Ce contrôle se fait en deux étapes :

  • une déclaration obligatoire à effectuer en ligne sur le site Portos, pour que la SAFER soit informée de l’opération ;

  • et, dans certains cas, une autorisation préfectorale à obtenir si la transmission des parts modifie le contrôle de la société et fait dépasser certains seuils de surface. 

À noter : dans cette procédure, la SAFER ne décide pas. Elle instruit le dossier, donne un avis, mais c’est le préfet qui prend la décision finale d’autoriser ou non la cession des parts sociales.

Une déclaration obligatoire 

Avant de céder des parts, il faut faire une déclaration en ligne sur le site Portos, géré par la SAFER. Dans la pratique, cette démarche est souvent réalisée par un professionnel du droit : notaire, avocat ou juriste chargé d’accompagner la transmission. 

Cette obligation de déclaration s’applique dès lors que la société détient ou exploite, même indirectement, des terres agricoles.

Sont concernés :

  • les cessions (vente, donation, transmission) de parts ou d’actions, même partielles ;

  • sur des parts de sociétés ayant leur siège en France ou à l’étranger, dès lors qu’elles détiennent ou exploitent du foncier agricole en France ;

  • pour toutes les opérations qui modifient la répartition du capital ou des droits de vote : augmentation, réduction, fusion…

La déclaration doit être faite par le cédant (vendeur, donateur…), au moins deux mois avant la cession des parts. Une fois envoyée, la SAFER en accuse réception sous 10 jours et publie un avis dans le mois. Des frais d’environ 360 € sont à prévoir.

Attention : En cas d’oubli de déclaration, la cession peut être déclarée irrégulière, ce qui peut entraîner son annulation et des sanctions financières pour le cédant.

Quand faut-il une autorisation préfectorale de cession des parts sociales ?

Dans certains cas, faire une simple déclaration ne suffit pas. Il faut aussi obtenir une autorisation officielle du préfet avant de céder les parts sociales. Cette étape s’applique lorsque la cession entraîne une prise de contrôle de la société agricole et que cela aboutit à dépasser une certaine surface de terres exploitées.

Deux conditions doivent être réunies :

  • La prise de contrôle de la société : cela signifie que la personne qui reprend les parts va détenir un poids important dans les décisions de la société. Par exemple, on considère que ce seuil est franchi quand une personne ou un groupe détient plus de 40 % des droits de vote et qu’aucun autre associé n’en détient autant.
  • Le dépassement d’un seuil de surface : ce seuil est défini par la préfecture dans chaque département. Il correspond à la surface maximale qu’une même personne peut exploiter localement sans autorisation. 

Par exemple :

  • 120 hectares en Nouvelle-Aquitaine,
  • 342 hectares en Île-de-France,
  • 9 hectares à La Réunion.

Ces seuils tiennent compte des spécificités locales : densité agricole, pression foncière, équilibre territorial, etc.

Certaines cessions sont dispensées d’autorisation préfectorale : c’est le cas des transmissions familiales (jusqu’au 4ᵉ degré), des cessions entre associés de longue date (au moins 9 ans), ou des opérations menées par la SAFER. Dans ces situations, seule la déclaration sur Portos est requise. Le repreneur peut toutefois devoir s’engager à conserver les parts ou à rester impliqué dans l’exploitation.

Ce que prévoit la procédure d’autorisation 

La demande d’autorisation doit être déposée avant la cession, via le site Portos. La SAFER donne un avis, puis le préfet prend sa décision. 

Une fois la demande envoyée, le préfet a deux mois pour donner sa réponse.
S’il ne répond pas dans ce délai, cela vaut accord automatique : l’autorisation est considérée comme accordée. Cela évite qu’un silence administratif bloque la transmission indéfiniment.

Mais il y a une exception : si le préfet envisage d’imposer des mesures compensatoires pour limiter l’impact de la cession (comme l’obligation de céder d’autres terres ou de ne pas exploiter certaines surfaces), le délai peut être prolongé jusqu’à 10 mois.
Dans ce cas, l’autorisation n’est pas donnée automatiquement : il faudra attendre une réponse écrite du préfet pour pouvoir effectuer la transmission.

Attention : Si la cession est réalisée sans autorisation alors qu’elle était obligatoire, elle peut être annulée. Le cédant s’expose aussi à une amende pouvant atteindre 2 % du montant de la transaction.

CESSION À TITRE ONÉREUX OU GRATUIT : QUELLES CONSÉQUENCES FISCALES ?

La vente ou la transmission de parts sociales entraîne parfois une imposition. Voici ce qu’il faut savoir.

En cas de cession onéreuse :

Si la valeur des parts a augmenté depuis leur achat, cela génère une plus-value. Cette plus-value peut être imposée.

  • Si l’associé travaille dans la société et que celle-ci est soumise à l’impôt sur le revenu, la plus-value est dite professionnelle. Elle peut, dans certains cas, être exonérée, notamment en cas de petit chiffre d’affaires ou de départ à la retraite.
  • Dans les autres cas, la plus-value est considérée comme privée (par exemple si l’associé ne travaille pas dans la société, ou si la société est à l’impôt sur les sociétés). Elle est alors en principe soumise à un taux forfaitaire de 30 % (prélèvement forfaitaire unique) qui inclut l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux. 

Il faut aussi s’attendre à des frais d’enregistrement. Pour les sociétés agricoles (comme les EARL ou les GAEC), ces frais sont souvent de 125 €, mais ils peuvent être plus élevés dans d’autres cas.  Notamment si la société a été créée récemment ou détient majoritairement de l’immobilier, les frais peuvent atteindre 3 % voire 5 % de la valeur des parts. 

En cas de cession gratuite : 

Transmettre ses parts sociales à titre gratuit entraîne des règles fiscales spécifiques.

Une plus-value est calculée, si la valeur des parts a augmenté depuis leur achat.
Mais elle n’est pas imposée tout de suite si les parts sont données à une personne physique (comme un membre de la famille). En général, l’impôt est seulement « mis en pause » : on parle alors de plus-value mises en report d’imposition. L'impôt ne sera payé que si la personne qui a reçu les parts décide de les revendre plus tard.

En revanche, dans certains cas moins fréquents (par exemple si les parts sont données à une société), l’impôt peut être dû immédiatement.

Des frais de donation peuvent aussi s’appliquer. Leur montant dépend du lien de parenté avec la personne à qui les parts sont données. 

Par exemple : 

  • À un enfant, un parent peut donner jusqu’à 100 000 € sans payer d’impôt.
  • À un neveu ou une nièce, l’exonération est plus faible : seulement 7 967 €.
  • Au-delà de ces montants, des droits de donation sont calculés selon un barème progressif (plus la valeur transmise est élevée, plus le taux augmente).

Il existe un dispositif permettant de réduire les droits de donation : le pacte Dutreil.

Il permet une exonération de 75 %, sous certaines conditions, dont l’obligation :

  • de conserver les parts pendant plusieurs années,
  • et de continuer l’activité agricole.

Ce mécanisme est souvent utilisé lors d’une transmission familiale, par exemple quand un agriculteur prépare son départ à la retraite et souhaite passer le flambeau à son enfant.

Pour réussir cette transmission dans les meilleures conditions, il est fortement conseillé de se faire accompagner par un avocat fiscaliste. Ce professionnel pourra vous aider à optimiser les frais, sécuriser l’opération et vous guider dans les démarches liées à la donation et à la transmission de l’exploitation.

POUR RÉSUMER : 

  • Céder ses parts revient à quitter la société et à transmettre sa place à un nouvel associé.

  • Cela peut se faire à titre gratuit (donation, succession) ou à titre onéreux (vente, échange…).

  • Il est essentiel de vérifier les statuts et de formaliser l’opération par écrit.

  • Une déclaration sur le site Portos est souvent obligatoire, même en cas de transmission familiale.

  • Dans certains cas, une autorisation du préfet est requise.

  • La fiscalité dépend du type de cession, mais des exonérations existent sous conditions.

  • Pour sécuriser l’opération, il est vivement recommandé de se faire accompagner par un avocat en droit rural.

QUESTIONS COURANTES 

1. Peut-on céder seulement une partie de ses parts sociales ?

Oui. Il est possible de vendre ou de donner une partie de ses parts seulement. Mais il faut respecter ce que prévoient les statuts et faire les démarches obligatoires (déclaration sur Portos, autorisation si besoin).

2. Peut-on prévoir une clause de rachat prioritaire dans les statuts ?

Oui. Les statuts peuvent inclure une clause de rachat préférentiel au profit des autres associés ou d’un tiers désigné. Cela permet d’éviter l’entrée d’un associé non souhaité.

3. Que se passe-t-il si les associés refusent la cession malgré le respect des règles ?

Si les statuts exigent leur accord (clause d’agrément), la cession peut être bloquée. En cas de refus injustifié, on peut saisir un juge pour débloquer la situation.

4. Peut-on céder ses parts à un enfant mineur ?

Oui, c’est possible, notamment dans le cadre d’une donation. Mais il faudra que le représentant légal (souvent le parent) accepte la donation pour le compte de l’enfant, et parfois obtenir l’autorisation du juge des tutelles si la cession est jugée risquée pour l’enfant.

SOURCES : 

Loi n° 2021‑1756 du 23 décembre 2021 (dite loi Sempastous) : encadrement des cessions de parts sociales de société agricole.

Décret n° 2022‑1515 du 2 décembre 2022 : modalités de la procédure d’autorisation de transmission des parts sociales.

Articles L.141-1, L.141-1-1, L.143-1 et L.143-1-1 du Code rural et de la pêche maritime : information obligatoire de la SAFER et droit de préemption.

Articles 726 et 150-0 D à 150-0 D ter du Code général des impôts (CGI) : droits d’enregistrement et imposition des plus-values privées.

Articles 151 septies, 151 septies A et 151 septies B du CGI : exonérations des plus-values professionnelles sous conditions.

Articles 787 B et 787 C du CGI : pacte Dutreil et exonérations partielles sur les donations/successions.

Articles 1861 à 1863 du Code civil : agrément dans les sociétés civiles (EARL, GAEC, SCEA...).

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